Ma mémoire se remplit inexorablement à nouveau, très lentement, de souvenirs informels, disproportionnés, défigurés ; ils m'assaillent à la manière d'un ballet de macreuses funèbres. Aucun bruit, pourtant, à part des voix. Ces voix silencieuses dans ma tête. Une en particulier. Une, plus forte que toutes les autres. Une, plus distincte que toutes les autres. Pas vraiment une voix, un cri plutôt. Non. Un hurlement. Oui ! Exactement ça, un terrible hurlement incessant dans ma pauvre tête, et qui gueule maestoso : « Tu es lesbienne, lesbienne ! Quand vas-tu t'accepter ? » Les larmes coulent sur mes joues. Je ne sais plus qui je suis vraiment. Je ne sais plus. Je sais simplement que je dois avancer sur un sentier invisible, dans une nuit opaque, sombre, sans étoile.