À mains nues

Jusqu’alors, j’étais dans le combat. Je devais lutter contre l’ennemi, ces crabes qui, tels des termites, me rongeaient les os, en attendant le pire. J’étais en cela aidé par les moyens les plus performants qui se puissent concevoir issus de la science, et de ma farouche énergie à affronter l’envahisseur. Aujourd’hui j’ai compris : je n’ai plus aucune arme à ma disposition. Je ne vaincrai pas. Au lieu de vouloir en découdre en de vaines gesticulations, il me faut accepter la réalité. Je n’ai pas le cancer, je suis cancéreux. Je dois l’adopter et terminer mon existence avec lui, avec le plus de sérénité possible. Il est en moi, il m’appartient, il est moi, concentré dans mes cellules. Car vouloir me mesurer à lui, ça serait comme si, par magie, en me frottant le corps, il surgissait soudain face à moi, tel le génie de la lampe d’Aladin, soudain expansé, énorme, colossal. Une entité dotée d’une force prodigieuse qu’il me faudrait combattre… à mains nues.