Depuis longtemps, je ne pouvais plus faire acte de présence au monde, l’habiter ou le traverser sans l’interroger sur l’ordre planétaire qui règne, les rapports de pouvoir, les aliénations, les acculturations forcées, les idéologies dominantes. Je n’adhère plus sans réserve aux valeurs de l’universalisme de la démocratie libérale oligarchique, du néo-féminisme androphobe et castrateur, du capitalisme avec son économie monétarisée, financiarisée, consumériste et multinationale. Je réalise enfin depuis quelques années mon vieux rêve de géographe-anthropologue qui consiste à vouloir apprendre à vivre dans un pays du tiers-monde, préindustriel, parmi les Afro-Arabo-musulmans, les hommes de couleur et des sociétés indigènes. Parce que je préfère démasquer les impostures et comprendre les stratégies des arrière-pensées néocoloniales, je veux accéder à une certaine profondeur dans la compréhension des structures définissant les rapports de domination entre l’homme de couleur, les sociétés indigènes et l’Occident. Mon expérience relève d’un défi qui consiste à vivre dans cette région du monde où le système matriarcal et le capitalisme n’ont pas encore totalement envahi la société. Ce livre est le récit d’une démarche pour me décoloniser du suprémacisme occidental, autrement dit de l’occidentalocentrisme. Il est l’aboutissement d’un travail qui associe mes recherches à mon histoire personnelle.